samedi 20 octobre 2018

GEVAUDAN - Imperium [CHRONIQUE]

GEVAUDAN
Imperium

CD Digipack
Martel En Tête
2018

 Laurent K, de BUNKER 84, nous avait déjà surpris en 2016, avec le premier CD Renaissance de son projet solo Electro-industriel BKR42. Celui-ci, désorientant voire déconcertant les uns tandis qu'il remportait la franche adhésion des autres, avait été fort diversement accueilli par son auditoire (pour mémoire, se reporter à la chronique publiée sur WARDANCE). Le nouveau projet du même homme porte cette fois le  nom évocateur de GEVAUDAN, ce qui n'apparait pas fortuit dès lors que l'on fait le rapprochement entre cette
référence historique et d'autres, ainsi - et surtout - qu'avec une certaine symbolique, dont ni la nature ni le sens n'échapperont aux "initiés".

Là où BKR42, dont le répertoire consistait notamment en nouvelles versions revisitées de vieux titres de BUNKER 84, se caractérisait par un style s'inscrivant quelque part entre l'EBM classique de FRONT 242 et l'Electro-dark aux sonorités à la fois popisantes et industrielles de VNV NATION, le nouveau projet  s'avère quant à lui encore plus audacieux. GEVAUDAN s'aventure en effet un peu plus loin encore sur la  voie de l'expérimentation, puisque son Electro-Indus se fait ici plus extrême, frisant même à de très nombreuses reprises la Psytrance (ou Trance psychédélique), ce qui, étant personnellement très amateur du genre, n'est pas pour me déplaire, tant s'en faut.
C'est le visage aux traits durs et à l'expression fermée d'une célèbre sculpture signée  Arno Breker qui orne la pochette de ce digipack assez minimaliste, sans livret, pour un visuel austère et sombre qui correspond plutôt bien au fond comme à la forme

Dès la première piste, dont le titre "Der Wehrwolf" fait clairement allusion à un fameux roman d'Hermann Löns (intitulé Le loup-garou dans sa traduction française, les connaisseurs apprécieront), le ton est donné avec ses samples de hurlements lupins en guise de vocaux qui résonnent comme autant de cris de guerre et d'appels à la résistance, solitaire comme clanique. C'est d'ailleurs bien là le fil conducteur de l'oeuvre dans son ensemble, dont l'esprit semble combiner désillusion, révolte individuelle, survivalisme, et tribalisme identitaire .


Si les rythmiques y restent dans l'ensemble assez dansantes, le ton n'a rien de festif pour autant, car leur côté froid et répétitif, sur fond d'atmosphères qui se font tout à la fois hypnotiques et psychédéliques, a quelque chose d'inquiétant, d'anxiogène voire de névrotique. C'est précisément parce que cette musique électronique bizarroïde, aux mélodies minimalistes, qui nous immerge dans un univers étrange et quasi-autistique, n'est somme toute que le reflet d'une bien dure réalité. Elle parvient très efficacement à retranscrire sous forme sonique le malaise croissant et la sensation d'étouffement, d'écrasement induits dans le cadre d'un système socio-politique de plus en plus intrusif et oppressif. Un cauchemar éveillé qui découle du glissement insidieux mais inexorable de la société moderne vers un monde totalitaire peu ou prou semblable à ceux que décrivaient le 1984 de George Orwell ou le Meilleur des  mondes d'Aldous Huxley , fameuses dystopies dont on peut aujourd'hui jauger à sa juste mesure la dimension éminemment prophétique.

Sans vocaux à proprement parler, les douze plages constituant l'album se font pour l'essentiel instrumentales, émaillées toutefois de samples d'origines diverses et variées, et soulignant la thématique de chacune d'entre elles.

Ainsi, sur le titre "Imperium", on retrouvera les voix de  Pierre Krebs, de Pierre Vial, de Robert Dun, et de Laurent K lui-même.
"De la lande à la steppe, et des fjords aux maquis". Une formule concise et joliment imagée qui figure les quatre points cardinaux délimitant l'Imperium, pour l'unification du vieux continent.

Dans "Destination Spéciale", les connaisseurs pourront reconnaître, en sample symphonique de fin,  le  morceau
"Mars" de Gustav Holst.



Si, dans "Requiem pour cerveaux malades", les samples sont tirés du film 1984, de Michael Radford,  on pourra aussi y reconnaître une exclamation récente de l'animateur TV Patrick Cohen, en rapport direct avec le titre et la thématique du morceau. A savoir, signe des temps, la psychiatrisation d'essence dictatoriale de toutes les voix non-conformes et dissidentes. "Qui commande le passé commande l'avenir. Qui commande le présent, commande le passé"...


"C'est dans les périodes d'exception que naissent les réflexions profondes. Cette immigration-invasion provoque un réveil identitaire, qui redonne toutes ses chances à l'Europe, et aux Européens" : c'est entre autres paroles que se fait ainsi entendre la voix de Dominique Venner, complétée par le "Presente !" des militants italiens de Casapound,  sur "Un Coeur Rebelle".



Dans "Cas D'Urgence", le sample "Alarme !" est pour sa part tiré du film Das Boot.


Dans "Tyrannie Planétarienne", on peut entendre l'ineffable Jacques Attali...


Enfin, les vers de l'intro d' "Horizon Corsaire" sont quant à eux de Louise Michel. Cette référence inattendue illustre bien l'état d'esprit qui anime aujourd'hui Laurent K, comme le souligne d'ailleurs le bref avertissement qui figure au-dessus d'une citation de Pierre-Joseph Proudhon ("Agir c'est combattre") à l'intérieur du digipack : "Le port du casque à boulons est vivement déconseillé pour une écoute saine et décomplexée".
Une recommandation qui parle d'elle-même, et qu'il ne sera donc nul besoin d'expliciter.


Ainsi que le déclarait dernièrement un vétéran de la politique française qui, s'il s'est aujourd'hui quelque peu retiré de la vie publique,  fait aujourd'hui figure de "vieux sage",
nous devons nous préparer à l'adversité, car elle arrive. A vrai dire, elle est déjà là, la chose étant chaque jour qui passe d'une évidence sans cesse plus criante. Mais dites-vous bien qu'aussi apocalyptique puisse paraître le contexte actuel, nous n'avons peut-être encore rien vu... L'heure est à la résistance, clandestine au besoin. Nous sommes entrés dans une période extrêmement sombre, une époque de dégénérescence généralisée qui va à contre-courant de toutes valeurs qui nous sont chères, et une époque hélas appelée à durer un certain temps. Mais l'avenir appartiendra in fine aux plus persévérants, aux plus endurants,  à ceux qui sauront y survivre et la traverser en surfant sur la sombre vague du Kali Yuga, en chevauchant le tigre...

En résumé
, ainsi que nous le rappelle la voix du regretté Robert Dun dans le morceau "Imperium", il nous faut être portés par une grande vision. Et au-delà d'une sorte de pessimisme combatif qui n'est somme toute que le constat réaliste d'un esprit éveillé, c'est bien là l'essence profonde du message délivré par Laurent K à travers cet album.

Je conclurai ces quelques mots de présentation par l'expression d'un avis tout personnel.
Si certains ont pu être rebutés par les sons électroniques et synthétiques de BKR42, il ne fait guère de doute qu'ils le seront a fortiori par ceux de GEVAUDAN, puisque ceux-ci relèvent d'une démarche créatrice encore plus introspective, encore plus cérébrale, encore plus chargée de symbolisme, et, finalement, sans doute encore moins finalement accessible, surtout pour ceux qui ne sont pas familiarisés avec ce style. En revanche, je conseille fortement la découverte de cette oeuvre de qualité aux personnes qui apprécient d'ores et déjà déjà la Psytrance et/ou l'Electro-dark, voire l'Indus, car il n'y a à mon humble avis que fort peu de chances qu'elles regrettent l'acquisition de ce petit bijou. Toutefois, qu'elles ne tardent pas : l'objet n'a fait l'objet que d'un pressage limité à seulement 100 exemplaires !...  En ce qui me concerne, si j'avoue avoir été quelque peu surpris au premier abord, quelques écoutes attentives supplémentaires n'auront pas tardé à me faire apprécier Imperium à sa juste valeur. A tel point qu'il me serait désormais très difficile d'exprimer une préférence quelconque pour l'un ou pour  l'autre de ces deux projets. Entre BKR42 et GEVAUDAN, mon coeur balance... Et croyez-moi, ce n'est pas peu dire.


Doktor G. 

(aka Hanns Wehrwolf)




Note : 9/10
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TRACKLIST

1. Der Wehrwolf  2:33
2. Imperium 
6:33
3. Destination spéciale 
4:07
4. Requiem pour cerveaux malades 
5:20
5. Rupture et convergence 
3:38
6. La victoire ou la mort 
5:12
7. Un coerur rebelle 
3:21
8. Verticalité 
2:20
9. Cas d'urgence 
4:21
10. Tyrannie planétarienne 
4:22
11. Horizon corsaire 
2:53
12. Amor Fati 
3:53

Durée totale : 48mn

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CD Digipack
disponible via la
boutique en ligne de M.E.T. :

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"Requiem pour cerveaux malades"




"Un coeur rebelle"

"Amor Fati"



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