vendredi 18 octobre 2019

DEVIATE DAMAEN - In Sanctitate, Benignitatis Non Miseretur ! [CHRONIQUE]

DEVIATE DAMAEN
 In Sanctitate, Benignitatis Non Miseretur !

CD

Masked Dead Records
2019

D'entrée de jeu, avec une très longue intro de spoken words qui ouvre l'album en s'étalant sur près de dix minutes, ce n'était pas gagné. Je n'ai pu m'empêcher de penser que chroniquer une telle oeuvre relevait de la gageure pour quiconque ne maîtrise pas la langue de Dante... ce qui est précisément mon cas. Et l'exercice semblait se corser d'autant plus que la musique, débutant enfin, sort à ce point des sentiers battus qu'elle parait complètement délirante et décousue, caricaturale et grandiloquente, comme si elle ne relevait finalement que de la farce, de la parodie... Premières impressions pour le moins mitigées, donc. Mais celles-ci allaient par la suite se nuancer au point de quasiment s'inverser, comme on pourra le voir en lisant ce qui suit.

DEVIATE DAMAEN est à peu près inconnu sous nos cieux, et en ce qui me concerne, je n'en avais d'ailleurs jamais entendu parler auparavant. Le groupe, notamment connu pour son discours  politiquement incorrect, n'est pourtant pas un nouveau venu, puisqu'il a réalisé son premier album voici déjà vingt ans chez Avantgarde Music, et qu'il bénéficie en outre depuis déjà longtemps d'une certaine notoriété au sein du public transalpin. Non pas qu'il s'agisse d'un nom célébrissime en Italie, mais il fait néanmoins figure de formation culte auprès d'un certain nombre de connaisseurs. Et c'est donc à Masked Dead Records, label underground italien qui s'est spécialisé dans l'édition d'artistes avant-gardistes et volontiers atypique, qu'échoit l'honneur de réaliser ce nouvel -et quatrième- album. La présentation du CD est soignée, et il est accompagné d'un somptueux livret de 16 pages comprenant photos, illustrations diverses, intégralité des paroles et plus encore.

Entrons à présent dans le vif du sujet, en abordant un style qu'il est plutôt difficile de décrire, et qui ne saurait se résumer à une étiquette très précise, aussi improbable et composite soit-elle.


Outre les longs passages parlés déjà évoqués, constitués d'un savant montage de samples divers, d'effets sonores, de commentaires volubiles et de dialogues téléphoniques faisant apparemment souvent allusion à la religion, cette musique s'avère plutôt variée et d'une assez grande richesse. Elle évolue entre Dark/Doom Metal expérimental, Goth pompeux et Deathrock assez kitsch rappelant quelque peu CHRISTIAN DEATH mouture Valor, tout particulièrement dans ses enregistrements les plus théâtraux. Et théâtraux, les vocaux, tout particulièrement, le sont à l'envi. Marqués par de nombreux changements d'intonation, avec force trémolos et vibratos, allant du chant lyrique tendance soprano au baryton, c'est même ce qui selon moi caractérise le plus la musique de DEVIATE DAMAEN. Et après avoir fait quelques recherches afin d'en savoir plus, je peux avancer sans risque de me tromper que ce nouvel album s'inscrit, globalement, dans la continuité des précédentes réalisations du groupe.

Les ambiances que l'on traverse successivement sont diverses et variées, et on se plait à évoluer ainsi entre opérette et cabaret, envolées épiques et atmosphères pompeuses, chants d'église et orgues aux mélopées funèbres, sur fond de nombreuses allusions théologiques et démonologiques.

Sans détailler l'intégralité de l'opus,
on pourra noter que le second morceau, Tethrus, est sans conteste l'un des morceaux phares de l'album. Plutôt long (près de 12 minutes), il s'articule en plusieurs parties distinctes : débutant par une rythmique doomesque très lourde et au tempo lent, accompagnant un chant aux accents de psalmodie lancinante, il se déchaîne tout à coup en une sorte de brève cacophonie furibonde avec vocaux grondants de type Death Metal, avant de revenir aux ambiances précédentes,   puis de s'orienter vers un final plus agressif aux vociférations démoniaques façon Black Metal...

Comme le laisse présager son titre bilingue, la troisième piste Sacre Gesta Cavalcano Il Metallo / Heilige Taten Reiten Das Metall se singularise par le fait qu'elle est chantée en partie en italien, et en partie en allemand, les alternances de vocaux entre ces deux langues produisant un résultat du meilleur effet.

Le quatrième titre,
Santo Frà Diavolo, Spara Per Noi !, après une intro qui n'en laisse rien présager, contraste fortement avec les précédents par sa rapidité endiablée et ses vocaux énervés, bien qu'il soit entrecoupé de brusques ralentissements... pour repartir de plus belle en sa bruyante frénésie.

Autre titre phare, le septième morceau
Font Near The Ossuary se caractérise quant à lui par son alternance de vocaux black et de chant lyrique masculin, et c'est sans nul doute celui qui, sur l'ensemble du disque, se rapproche le plus d'une sorte de Black Metal (ou de post-BM) avant-gardiste et expérimental. 

La dernière piste
L'Urlo Del Cappuccino, quant à elle, consiste en un passage parlé sur un fond dissonant et saturé à la limite du supportable, quelque part entre bruit de perceuse et roulette de dentiste... Un final quelque peu éprouvant pour les nerfs, il faut bien le dire.


Bref, vous voyez ? S'il vous prend l'envie d'écouter ça, attendez-vous à des surprises...

En conclusion, je dirais que le style musical de DEVIATE DAMAEN, tout comme la structure même de l'album, ont quelque chose de si atypique que c'en est assez déroutant pour les non-initiés. Je dois avouer que je n'avais guère été enchanté de prime abord, en "survolant" l'ensemble de l'oeuvre... Et pour ne rien vous cacher, je ne me sentais pas vraiment disposé à en rédiger un compte rendu favorable. Toutefois, trois ou quatre écoutes ultérieures de l'intégralité du disque auront finalement réussi à m'accoutumer à un univers sonore tout particulier qui n'est, finalement, pas dépourvu de charme, tant s'en faut. Il faut dire que les passages parlés, auxquels je ne saisis pas grand-chose, ont de quoi rebuter l'auditeur étranger qui  ne parle pas italien. Je ne doute pas de l'intérêt du propos ainsi délivré, surtout compte tenu du caractère quelque peu "sulfureux" du groupe. Mais lorsqu'on n'y comprend rien -ou presque- , l'intérêt s'en voit forcément atténué, et cela a tôt fait d'apparaître comme de dispensables longueurs... Sans doute est-ce là le principal point faible du disque, du moins d'un point de vue extérieur à la patrie du groupe. Reste qu'il s'agit,  au final et globalement, d'une oeuvre originale et fortement personnalisée, difficilement classable, et qui parvient, moyennant quelques efforts d'adaptation, à nous entraîner au coeur de son univers baroque et fantasmagorique. Une sympathique découverte.



Hans Cany


NOTE : 6,5/10

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CD et album digital
disponibles via le Bandcamp
du label :
maskedeadrecords.bandcamp.com

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TRACKLIST


1. L'Angelo Preferito, Il Primo Insorto, Il Più Antico Dannato (Intro) 09:43
2. Tethrus 11:51
3. Sacre Gesta Cavalcano Il Metallo / Heilige Taten Reiten Das Metall 10:05
4. Santo Frà Diavolo, Spara Per Noi ! 05:34
5. Aspetterò L'Altrove 08:01
6. I Tarocchi Della Vostra Sfiga 08:31
7. Font Near The Ossuary 06:39
8. Fratelli D'Occidente, Salviamo Noi Stessi Dall'Estinzione ! 04:13
9. Signore E Dio In Te Confido 02:21
10. L'Urlo Del Cappuccino 06:26

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VIDEOS


"Sacre Gesta Cavalcano Il Metallo"



"Tethrus"




"Font near the ossuary"


"Fratelli d'occidente, salviamo noi stessi dall'estinzione!"



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